Hacking éthique
Mounir Nji Amine a fait de la sécurité cybernétique son cheval de bataille. Ce prodige au parcours atypique est le promoteur d’Enix, une start-up qui propose des solutions innovantes dans le domaine du hacking éthique. Portrait.
Dans un contexte local où l’accès à la technologie n’est pas aisé, Mounir Nji Amine, 23 ans, s’est frayé un chemin dans le domaine de la sécurité cybernétique. Ce jeune camerounais, passionné d’informatique depuis ses années lycée, est aujourd’hui le fondateur d’Enix, une entreprise de lutte contre le cybercrime.
«Nous offrons des solutions intelligentes en matière de cybersécurité, adaptées aux besoins des clients. Nous proposons également des formations en adéquation avec le contexte et les objectifs de chacun, des solutions d’investigation, des tests d’intrusion, de protection des systèmes IT (technologie de l’information) et de veille», détaille le jeune entrepreneur au micro de Sputnik.
Constituée d’une dizaine de jeunes de moins de 30 ans, avec des compétences pluridisciplinaires, la start-up de Mounir Nji Amine a mis sur pied un système de hacking éthique qu’elle propose aux entreprises. «Les hackers éthiques se mettent dans la peau d’un pirate pour comprendre comment il agit afin de s’en protéger, explique l’entrepreneur. Ils comprennent les techniques que des criminels utiliseraient dans le but d’accéder aux réseaux d’une entreprise pour déployer des programmes malveillants.»
«Nous travaillons en grande partie pour les entreprises les plus exposées aux menaces sécuritaires, notamment les organismes de sécurité et de défense, les entreprises financières technologiques. Nous collaborons aussi avec les centres de formation professionnelle et universitaire afin de les prémunir contre des menaces existantes», explique le geek au micro de Sputnik.
Originaire de Foumban dans la région de l’ouest Cameroun, Mounir Nji Amine découvre l’informatique à tout hasard dans un cybercafé de fortune où il avait pris l’habitude de se rendre pour des parties de jeux vidéo. Piqué par ce virus, il va bénéficier de l’encadrement de ses enseignants au collège. Une période d’apprentissage qu’il relate encore avec enthousiasme.
«J’ai eu la chance de me retrouver en 5e au sein du club informatique du lycée classique de Bangangté , avec un enseignant et des aînés formidables qui m’ont permis, à travers de petits projets, d’avoir une bonne maîtrise des outils couramment utilisés dans le domaine informatique. Mais aussi et surtout d’avoir une vision d’ensemble du codage», se souvient-il au micro de Sputnik.
De fil en aiguille, ce mordu de nouvelles technologies va tisser sa toile en décelant les failles du codage informatique. À partir de là commence véritablement son challenge. Ne disposant pas d’un ordinateur personnel, le jeune geek va user de toutes les astuces possibles pour assouvir sa curiosité scientifique.
«Puisque je travaillais uniquement au cybercafé, j’avais trouvé des techniques pour bidouiller les gestionnaires de temps. Ceci permettait de prolonger mon temps de connexion initial. Et quand j’ai eu mon premier téléphone mobile, il m’a fallu trouver constamment des méthodes pour avoir Internet gratuitement. Ensuite, j’ai développé mes connaissances informatiques à travers des documentaires, des formations en ligne, des films et des échanges sur les forums de hackers qui m’ont énormément permis d’apprendre, mais surtout de choisir de rester dans le hacking éthique», relate-t-il au micro de Sputnik.
Après l’obtention de son baccalauréat en 2013, Amine s’inscrit à l’université de Dschang à l’ouest du pays pour étudier les mathématiques et l’informatique. Il lance ensuite Enix Learning, une communauté spécialisée dans la formation en informatique. En deux ans, il formera plus de 200 jeunes au codage et au hacking éthique.
En 2014, lors d’un pitch à l’événement Startup Week-end, il est remarqué par le représentant de Microsoft au Cameroun qui lui propose de devenir «student patner» et représentant de Microsoft à l’université de Dschang. Une occasion en or que cet admirateur de Steve Jobs et de Bill Gates, très conscient des enjeux, ne va pas bouder.
«C’était déjà une belle opportunité d’apprentissage. En effet, Microsoft – via le programme de Student Partner et les Ms clubs –, tout comme Google et d’autres multinationales, mettent en place les ressources nécessaires pour soutenir et former les étudiants de leur communauté dans les universités à la maîtrise de leurs dernières technologies», explique le jeune entrepreneur.
De cette expérience, Mounir Nji Amine a beaucoup appris sur le mécanisme de ces firmes internationales. Il a bien intégré les astuces marketing et il les applique à son domaine.
«Mon expérience avec Microsoft m’a permis de voir à quel point prendre en compte le milieu universitaire, et de l’éducation en général, pouvait aider les entreprises à insérer les nouvelles solutions sur le marché plus rapidement. Un étudiant qui est formé à l’utilisation de la technologie d’une de ces entreprises influencera ses camarades des autres filières et ses proches. Comme il est difficile de se débarrasser d’une habitude, même demain, quand il ira en entreprise, il utilisera la même technologie, et il influencera aussi ses collaborateurs et sa hiérarchie. C’est un marketing qui nécessite beaucoup de patience mais d’une efficacité incroyable», commente le génie de l’informatique.
L’ancien étudiant de l’IAI (Institut africain d’informatique) Cameroun, qui multiplie des initiatives et forme des jeunes dans le domaine de la sécurité cybernétique, veut apporter la solution africaine aux problématiques liées à la sécurité informatique. C’est d’ailleurs ce message qu’il souhaite transmettre au Milipol Paris 2019 – l’événement mondial de la sûreté et de la sécurité intérieure des États qui se tiendra du 19 au 22 novembre prochains à Paris – où il est invité à présenter sa start-up.
«Bien que le cybercrime soit universel, la jeunesse africaine a également une expertise en cybersécurité et sur la lutte contre le cybercrime à partager avec les autres. Notre compétence prend en compte le savoir-faire global mais elle est aussi fortement liée à notre contexte», conclut-il au micro de Sputnik.
Mounir Nji Amine aura donc l’occasion de vendre son expertise devant les visiteurs et d’autres exposants à l’occasion de ce salon qui regroupera les professionnels des questions de sécurité globale. Une opportunité pour le jeune entrepreneur de mettre en relief le savoir-faire informatique de la jeunesse africaine.
Source: Sputnik